Cycle de conférences au Musée d’Aquitaine : l’illusion  cartographique

Une illusion de mise en ordre de l’espace qui fabrique parfois l’ordre bien réel de nos sociétés. Dressé dans les années 70/80, ce constat critique bouleverse encore aujourd’hui la lecture des cartes.


La carte n’est pas le territoire. Œuvre de l’esprit, interprétation de l’espace, elle est restée longtemps l’apanage du pouvoir, l’expression des dominants, véhiculant des représentations partielles, douteuses ou orientées.

En multipliant les approches, les terrains d’étude et les époques travaillées, ce cycle de conférences, initié d'octobre à décembre 2021 et qui reprend après une coupure de six mois, au Musée d’Aquitaine, se veut un exercice polyphonique de critique cartographique. En abordant des questions aussi diverses que la colonisation, les migrations, l’autochtonie ou l’écologie politique, les géographes, historiens et artistes qui interviendront, nous proposerons de réinterroger la carte jusque dans ses logiques d’imposition, de manipulation, de suppositions voire d’omissions.

 

Organisé en partenariat avec le laboratoire Passages et l’Université Bordeaux Montaigne, ce cycle de conférences (1 jeudi par mois de septembre à décembre 2021 de 18 h à 20 h) est proposé par Matthieu Noucher, chercheur au CNRS, à l’occasion de la sortie de l’Atlas Critique de la Guyane (CNRS Éditions), ouvrage collectif qui propose une lecture politique et diversifiée des enjeux de la cartographie en Guyane.



▶️ JEUDI 30 SEPTEMBRE 2021 - METTRE EN CARTE LES FORÊTS DE MADAGASCAR ET DE GUYANE, SCIENCE OU IDÉOLOGIE ?

Xavier Amelot, enseignant-chercheur en Géographie à l’Université Bordeaux Montaigne et membre de l’UMR Passages

Entre enfer vert et paradis perdu, les forêts tropicales humides constituent l’archétype occidental de la nature sauvage et symbolisent aujourd’hui les menaces qui pèsent sur la biodiversité.

Mais malgré la profusion d’images et de cartes, les forêts tropicales demeurent méconnues et leurs dynamiques plus complexes qu’il y parait.

À partir de l’exemple des forêts de Madagascar et de Guyane Française, l’imbrication des dimensions scientifiques, culturelles et idéologiques peut être mise en évidence par l’analyse critique des cartes et des discours qui s’y rapportent.

▶️ JEUDI 25 NOVEMBRE 2021 - DANS LE BLANC DES CARTES

Julien Béziat, enseignant-chercheur en Arts plastiques à l’Université Bordeaux Montaigne, membre de l’équipe de recherche Artes.

Toute cartographie a ses blancs, manques et oublis, volontaires ou non. Ils apparaissent dans l’écart entre l’espace et sa figuration par la carte, et laissent une place à l’imaginaire. Regarder les blancs des cartes, c’est d’abord comprendre leur signification au regard de l’histoire de la cartographie, et saisir leur permanence dans des formes contemporaines. C’est également suivre des voies tracées, puis effacées ou recouvertes, par les artistes, et retrouver ainsi le plaisir de se perdre.

▶️ JEUDI 9 DÉCEMBRE 2021 - LE DESSOUS DES FLUX. COMMENT LA CARTOGRAPHIE DES MOBILITÉS INFLUENCE NOS REPRÉSENTATIONS DES MIGRATIONS.

Frédéric Piantoni, enseignant-chercheur en Géographie, Université de Reims Champagne Ardenne, UMR Ceped (Paris Descartes, IRD)

Paradoxalement, alors que les migrations sont depuis 25 ans au cœur des études des Sciences Humaines et Sociales, les modes graphiques de dessin des mouvements ou des dynamiques ont majoritairement peu évolué, mobilisant lignes ou flèches sur le canevas des États ou des grands ensembles régionaux. Cet héritage a largement contribué à catégoriser et à instrumentaliser le fait migratoire.

Dans la période contemporaine, la dématérialisation de l’information, l’accès ouvert aux bases de données ainsi que les possibilités graphiques des modes de représentation permettent de proposer de nouveaux formats cartographiques restituant la diversité des connaissances sur les migrations.

Ainsi au renouvellement des approches scientifiques font écho de nouvelles formes cartographiques traduisant mieux la dimension spatiale des mobilités humaines et relativisant (ou dénonçant) le rôle des États sur des dynamiques humaines qui les dépassent.


Écoutez Matthieu Noucher, Chercheur au CNRS, Laboratoire Passages.

Interview réalisée par Frédéric Dussarrat